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Abstract: Self consistent field calculations, supplemented by M0ller-Plesset second-order estimates of correlation effects, are presented for the comp...
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Cancer/Radiothérapie 21 (2017) 510–514

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Mise au point

Place de la chimiothérapie d’induction dans le traitement des carcinomes épidermoïdes des voies aérodigestives supérieures : contre Role of induction chemotherapy in head and neck cancer: Cons F. Huguet a,∗,b , U. Schick c , Y. Pointreau d a

Service d’oncologie radiothérapie, hôpital Tenon, hôpitaux universitaires Est parisien, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France Université Pierre-et-Marie-Curie, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France c Service de radiothérapie, Institut de cancérologie et d’hématologie, CHRU Morvan, 2, avenue Foch, 29200 Brest, France d Service d’oncologie radiothérapie, institut inter-régional de cancérologie, centre Jean-Bernard–clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France b

i n f o

a r t i c l e

Mots clés : Cancers ORL Induction TPF Chimioradiothérapie HPV Survie Tolérance Métastases Docétaxel

r é s u m é Le traitement des carcinomes épidermoïdes des voies aérodigestives localement évolués repose sur la chimioradiothérapie concomitante. Un traitement séquentiel associant chimiothérapie d’induction par association de docétaxel, cisplatine et 5-fluoro-uracile (TPF), suivie d’une (chimio)radiothérapie, est utilisé fréquemment dans le cadre des stratégies de préservation laryngée. En dehors de cette situation particulière, le bénéfice en termes de survie d’une chimiothérapie d’induction a été beaucoup discuté ces dernières années. Dans cinq essais randomisés récents, une chimioradiothérapie a été comparée à une chimiothérapie d’induction par TPF, suivie d’une chimioradiothérapie. Parmi ces cinq essais, quatre concluent que ces traitements sont similaires. Un seul essai a montré un bénéfice de la chimiothérapie d’induction mais sa méthodologie est très discutable. Après la chimiothérapie par TPF, la chimioradiothérapie est moins bien tolérée. En cas d’envahissement ganglionnaire important (stade N2b-c-N3), la chimiothérapie d’induction permet de diminuer la survenue de métastases à distance. Le statut selon l’Human papilloma virus (HPV) ne doit pas influencer la décision thérapeutique. ´ e´ franc¸aise de radiotherapie ´ © 2017 Societ oncologique (SFRO). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous ´ ´ droits reserv es.

a b s t r a c t Keywords: Head and neck cancer Induction Chemoradiotherapy HPV Tolerance Survival Metastasis Docetaxel Taxanes

The treatment of locally advanced head and neck squamous cell carcinoma is based on concomitant chemoradiotherapy. A sequential treatment combining induction chemotherapy with docetaxel, cisplatin and 5-fluorouracil (TPF), followed by (chemo)radiotherapy is frequently used as part of laryngeal preservation strategies. Apart from this particular situation, the benefit in terms of survival of induction chemotherapy has been much discussed in recent years. In five recent randomized trials, chemoradiotherapy was compared with TPF induction chemotherapy followed by chemoradiotherapy. Of these five trials, four concluded that these treatments were similar. A single trial reports a benefit for induction chemotherapy but its methodology is highly debatable. After TPF chemotherapy, chemoradiotherapy is less well tolerated. In patients with significant lymph node invasion (N2b-c-N3), induction chemotherapy reduces the occurrence of distant metastasis. The HPV status should not influence the therapeutic decision. ´ e´ franc¸aise de radiotherapie ´ © 2017 Societ oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : fl[email protected] (F. Huguet). http://dx.doi.org/10.1016/j.canrad.2017.07.020 ´ e´ franc¸aise de radiotherapie ´ ´ ´ 1278-3218/© 2017 Societ oncologique (SFRO). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv es.

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1. Introduction En France, l’incidence des cancers des voies aérodigestives supérieures a été estimée à 14 700 cas en 2015 [1]. Dans la majorité des cas, les patients sont atteints d’une tumeur localement évoluée au moment du diagnostic. L’évolution des cancers des voies aérodigestives supérieures est essentiellement locorégionale, mais 10 à 20 % des patients sont atteints de métastases à distance durant leur évolution. La prise en charge de ces cancers est multidisciplinaire, associant la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie. Elle demande une collaboration étroite entre le chirurgien ORL, l’oncologue radiothérapeute et l’oncologue médical, mais aussi de nombreux autres spécialistes, tels que le radiologue, le nucléariste, l’anatomopathologiste, l’oncogériatre, tous réunis au sein de la réunion de concertation pluridisciplinaire. En fonction du stade de la maladie, le traitement associe de manière concomitante ou séquentielle ces différentes armes thérapeutiques. Schématiquement, les tumeurs localisées (de stades I et II) sont traitées préférentiellement par chirurgie à quelques exceptions près, telles que le carcinome épidermoïde de stade T1N0 du plan glottique. Pour les tumeurs localement évoluées au moment du diagnostic (de stades III et IV), le traitement de référence est la chimioradiothérapie depuis la publication par Pignon et al. des résultats de la MACH-NC (Meta-analysis of chemotherapy in head and neck cancer) [2–4]. Celle-ci a montré une amélioration de la probabilité de survie grâce à l’adjonction d’une chimiothérapie concomitante à la radiothérapie (bénéfice de 6,5 % à 5 ans). Une autre approche consiste à réaliser un traitement séquentiel associant une chimiothérapie première, dite chimiothérapie d’induction, suivie d’une radiothérapie ou d’une exérèse chirurgicale. En effet, depuis les années 1980, la chimiothérapie d’induction a suscité beaucoup d’intérêt, notamment grâce aux bons taux de réponse obtenus avec l’association de 5-fluoro-uracile et de cisplatine, puis avec le triplet docétaxel, 5-fluoro-uracile et cisplatine (TPF) [5–7]. Cette stratégie séquentielle a été particulièrement étudiée dans le cadre de la préservation laryngée [8]. En dehors de cette situation particulière qui ne sera pas abordée dans cet article, le bénéfice sur la survie de l’ajout d’une chimiothérapie d’induction n’a jamais été démontré. En 2005, Adam Garden, oncologue radiothérapeute au MD Anderson Cancer Centre à Houston, intitulait son éditorial dans le Journal of Clinical Oncology “Is there still a role for induction chemotherapy?” [9]. Presque 10 ans plus tard, dans le même journal, il signait à nouveau un éditorial dont le titre était « The never-ending story: finding a role for neoadjuvant chemotherapy in the management of head and neck cancer » [10]. À propos de la chimiothérapie d’induction, en dehors de la préservation laryngée, plusieurs questions se posent : • • • •

améliore-t-elle la probabilité de survie globale des patients ? diminue-t-elle le risque d’apparition de métastases à distance ? influe-t-elle sur la tolérance de la chimioradiothérapie ? le statut d’infection par le Human papilloma virus (HPV) influe-t-il sur la décision thérapeutique ?

L’objectif de cette revue de la littérature est de répondre à ces questions. 2. La chimiothérapie d’induction améliore-t-elle la probabilité de survie ? La première publication de la MACH-NC en 2000 a porté sur 63 essais prospectifs réalisés entre 1965 et 1993 comparant un traitement locorégional à un traitement locorégional associé à une chimiothérapie [2]. Celle-ci pouvait être néoadjuvante, concomitante ou adjuvante. Les données de 10 741 patients ont été

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actualisées et analysées. L’ajout d’une chimiothérapie améliorait la probabilité de survie globale de 4 % à 5 ans (hazard ratio [HR] : 0,9 ; intervalle de confiance à 95 % [IC95] : 0,85–0,94 ; p < 0,0001), ce qui se traduisait en une réduction du risque de décès de 10 % [2]. Pour les patients ayant rec¸u une chimiothérapie néoadjuvante, ce bénéfice n’était pas significatif (HR : 0,95 ; IC95 : 0,88–1,01 : p = 0,1), alors qu’il était très significatif pour les patients ayant rec¸u une chimiothérapie concomitante (HR : 0,81 ; IC95 : 0,76–0,88] ; p < 0,0001) avec une diminution relative du risque de décès de 19 %. Lors de l’actualisation de la MACH-NC publiée en 2009, 24 essais réalisés entre 1994 et 2000 ont été ajoutés avec un total de 16 485 patients [3]. Cette actualisation confirmait le bénéfice de la chimiothérapie avec un gain en termes de survie globale de 4,5 % à 5 ans (HR : 0,88 ; IC95 : 0,85–0,92 ; p < 0,0001). Trente et un essais incluant 5311 patients portaient sur la chimiothérapie d’induction. Dans cette population, le hazard ratio de décès était de 0,96 ([C95 : 0,90–1,02 ; p = 0,18), avec un bénéfice absolu non significatif de 2,4 % à 5 ans. Les comparaisons directes et indirectes entre chimiothérapie d’induction et chimiothérapie concomitante étaient nettement en faveur de la chimiothérapie concomitante. Cependant, la grande majorité de ces essais a été réalisée avec une chimiothérapie d’induction par association de 5-fluoro-uracile et de cisplatine et non par l’association TPF, plus efficace. Qu’en est-il des résultats des essais avec TPF ? À ce jour, nous disposons des résultats de cinq essais prospectifs de phase III dans lesquels les patients étaient randomisés entre une chimioradiothérapie (bras de référence) et une chimiothérapie d’induction par TPF, suivie d’une chimioradiothérapie ou d’une association de radiothérapie et de cétuximab (bras expérimental) (Tableau 1). Dans un essai de phase III espagnol mené par le Spanish Head and Neck Cancer Cooperative Group (TTCC), 439 patients atteints de cancer de stades III et IV ont été inclus et randomisés entre trois bras : trois cycles de 5-fluoro-uracile–cisplatine, puis une chimioradiothérapie, contre trois cycles de TPF, puis une chimioradiothérapie contre une chimioradiothérapie [12]. Dans les trois bras, la chimioradiothérapie délivrait une dose de 70 Gy en fractionnement classique avec une chimiothérapie concomitante par cisplatine de 100 mg/m2 à j1, j22 et j43. Les objectifs principaux étaient la comparaison entre les trois bras en termes de survie sans progression et de temps jusqu’à échec du traitement, avec une analyse en intention de traiter et une analyses per protocole (patients ayant rec¸u au moins un cycle de chimiothérapie d’induction et au moins un cycle de chimiothérapie concomitante). En intention de traiter, il n’y avait aucune différence entre les trois bras, que ce soit pour les objectifs principaux, la survie globale ou le taux de contrôle locorégional. Per protocole, les patients dans le bras TPF–chimioradiothérapie avaient une probabilité de survie sans progression plus longue que ceux dans le bras chimioradiothérapie (HR : 0,72 ; IC95 : 0,53–0,98 ; p = 0,03). Ils avaient aussi un meilleur taux de contrôle locorégional (68 % contre 52 %, p = 0,03). La place de la chimiothérapie d’induction a également été étudiée dans deux essais randomisés américains, PARADIGM et DeCIDE, dont nous ne pouvons malheureusement pas tirer beaucoup de conclusions [11,13]. En effet, ces deux essais ont été fermés avant d’avoir inclus le nombre de patients prévus (145 sur 300 dans PARADIGM et 285 sur 400 dans DeCIDE), ce qui entraînait un manque de puissance statistique. En outre, dans l’un comme dans l’autre, les investigateurs avaient choisi des combinaisons de radiothérapie et chimiothérapie inhabituelles. Ainsi, dans l’essai PARADIGM, les patients étaient randomisés entre une chimioradiothérapie accélérée de 72 Gy en six semaines avec deux cycles de cisplatine à j1 et j22 (bras de référence) et trois cycles de TPF, suivis en cas de bonne réponse d’une chimioradiothérapie de 70 Gy en fractionnement classique avec du carboplatine hebdomadaire (aire sous la courbe [AUC] : 1,5), et en cas de mauvaise réponse, une

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Tableau 1 Traitement des carcinomes épidermoïdes des voies aérodigestives supérieures : essais prospectifs ayant comparé une chimioradiothérapie exclusive à une chimiothérapie d’induction par association de docétaxel, cisplatine et 5-fluoro-uracile (TPF), suivie d’une chimioradiothérapie. Étude

Nombre de patients

Schéma

Bénéfice en termes de survie globale

Bénéfice sur la survenue de Tolérance de la métastases à distance chimioradiothérapie

Haddad et al., 2013 [11] 145

TPF chimioradiothérapie chimioradiothérapie





Hitt et al., 2014 [12]

TPF chimioradiothérapie



ne

439

TPF chimioradiothérapie chimioradiothérapie Cohen et al., 2014 [13]

280 N2–N3

TPF chimioradiothérapie chimioradiothérapie





ne

Ghi et al., 2014 [14]

421

TPF chimioradiothérapie ou radiothérapie-cétuximab chimioradiothérapie ou radiothérapie–cétuximab

+

ne

=

Geoffrois et al., 2016 [15]

370 N2b–N3

TPF radiothérapie–cétuximab chimioradiothérapie



+

=

chimioradiothérapie accélérée de 72 Gy en six semaines avec du docétaxel hebdomadaire (20 mg/m2 ) [11]. Dans l’essai DeCIDE, les patients recevaient une radiothérapie bifractionnée de 74 à 75 Gy avec une chimiothérapie concomitante par association de docétaxel, TPF et hydroxyurée, précédée ou pas de deux cycles de TPF [13]. Dans les deux essais, l’objectif principal était d’obtenir une amélioration de la probabilité de survie globale dans le bras avec chimiothérapie d’induction par TPF. Celle-ci était identique entre les deux bras dans les deux essais, avec les limites déjà évoquées. Le GSTTC, groupe italien de recherche en cancérologie ORL, a réalisé entre 2003 et 2006 un essai de phase II randomisé comparant une chimioradiothérapie de 70 Gy avec deux cycles de 5-fluorouracile-cisplatine concomitants à j1 et j43 à une séquence associant trois cycles de TPF, puis une chimioradiothérapie selon les même modalités que dans le bras contrôle [16]. L’objectif principal était le taux de réponse complète radiologique. Cent-un patients atteints d’un cancer ORL de stade III ou IV ont été inclus. Le taux de réponse complète radiologique était significativement plus élevé dans le bras TPF–chimioradiothérapie (50 % contre 21,3 %, p = 0,004). Les durées médianes de survie globale et de survie sans progression étaient elles aussi plus longues dans le bras expérimental. Cet essai s’est donc poursuivi par une étude de phase III dans laquelle une deuxième randomisation a été ajoutée, entre chimioradiothérapie et radiothérapie à la même dose avec cétuximab concomitant. Maria Grazia Ghi a présenté au congrès l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) en 2012, 2013 et 2014, les résultats groupés de l’essai de phase II randomisé et de l’essai de phase III, avec par conséquent quatre bras différents ne contenant pas le même nombre de patients, ce qui complique considérablement l’interprétation des résultats. Ces données portant sur 421 patients n’ont pas été publiées à ce jour. Si l’on considère l’analyse chimioradiothérapie (ou radiothérapie–cétuximab) contre TPF-CRT (ou radiothérapie–cétuximab) présentée en 2014 avec un suivi médian de 41 mois, le taux de survie globale à 3 ans était significativement plus élevé dans le bras avec TPF en induction (57,6 % contre 45,7 % ; HR : 0,72 ; IC95 : 0,55–0,96 ; p = 0,025) [14]. Ce bénéfice était particulièrement marqué chez les patients recevant du cétuximab (comparaison de radiothérapie–cétuximab contre TPF–radiothérapie–cétuximab : HR : 0,57 ; IC95 : 0,34–0,93), alors qu’il n’était pas significatif chez les patients recevant du cisplatine (comparaison chimioradiothérapie contre TPF–chimioradiothérapie : HR : 0,8 ; IC95 : 0,56–1,15). De même,

le bénéfice du TPF était plus important chez les patients atteints d’une tumeur non oropharyngée. Ces résultats sont cependant à considérer avec précaution étant donné les biais méthodologiques. Plus récemment, en 2016, Lionnel Geoffrois a communiqué les résultats de l’essai de phase III du Groupe d’oncologie radiothérapie tête et cou (Gortec) 2007-02 comparant chez des patients atteints d’ un cancer ORL de stade II ou IV et N2b/c ou N3 une chimioradiothérapie de 70 Gy en fractionnement classique avec une chimiothérapie concomitante par association de 5-fluoro-uracile et de carboplatine toutes les trois semaines (bras chimioradiothérapie) à une chimiothérapie d’induction par trois cycles de TPF, suivie d’une radiothérapie de 70 Gy en fractionnement classique avec du cétuximab concomitant aux doses classiques (bras TPF–radiothérapie–cétuximab) [15]. L’objectif principal était la survie sans progression. Entre 2009 et 2013, 370 patients ont été inclus. La durée de survie sans progression médiane était équivalente entre les deux bras (11,5 mois contre 12,5 mois, p = 0,58). Il en était de même pour la survie globale. En revanche, le taux de survie sans métastase à 2 ans était meilleur dans le bras TPF–radiothérapie–cétuximab (93 % contre 86 %, p = 0,03). L’essai INTERCEPTOR a utilisé le même protocole que l’essai du Gortec 2007-02, excepté que la chimiothérapie concomitante à la radiothérapie dans le bras chimioradiothérapie était du cisplatine à la dose de 100 mg/m2 à j1–j22 et j43. Ses résultats sont en attente. Sur les cinq essais randomisés réalisés ces dernières, quatre ne montrent pas de bénéfice à l’ajout d’une chimiothérapie d’induction. Le seul essai positif est méthodologiquement discutable et pencherait plutôt pour l’association de TPF suivie d’une radiothérapie et du cétuximab.

3. Impact sur la survenue de métastases à distance Il est généralement admis qu’en cas d’envahissement ganglionnaire important (stade N2–N3), le risque de métastases à distance plus élevé. Un des arguments en faveur de la chimiothérapie d’induction est que celle-ci pourrait diminuer le risque de survenue de métastases à distance, particulièrement chez les patients à haut risque. Dans l’essai PARADIGM, le taux de métastases à distance était de 7 % dans le bras TPF–chimioradiothérapie contre 11 % dans le bras chimioradiothérapie (p = 0,4) [11].

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Dans l’essai DeCIDE ayant inclus uniquement des patients avec un envahissement ganglionnaire important (de stade N2–N3), le taux de métastases à distance était de 13 % dans le bras TPF–chimioradiothérapie, contre 21 % dans le bras chimioradiothérapie (p = 0,11) [13]. Dans une étude de sous-groupe non planifiée, les patients avec un envahissement ganglionnaire de stade N2c ou N3 semblaient bénéficier davantage de la chimiothérapie d’induction que le patients avec une atteinte de stade N2a ou N2b, mais cela n’était pas statistiquement significatif. Dans l’essai du Gortec 2007-02 ayant inclus uniquement des patients avec un envahissement ganglionnaire important, de stade N2b/c ou N3, le taux de survie sans métastase à 2 ans était meilleur dans le bras TPF–radiothérapie–cétuximab (93 % contre 86 %, p = 0,03) [15]. Il semble donc que la chimiothérapie d’induction par TPF permette de réduire le risque de survenue de métastases à distance en cas d’envahissement ganglionnaire important.

4. Diminution de la tolérance de la chimioradiothérapie après chimiothérapie d’induction De nombreuses études rétrospectives ont suggéré que la tolérance de la chimioradiothérapie serait moins bonne après TPF, avec par conséquent une intensité de dose de cisplatine rec¸ue plus faible, pouvant compromettre l’efficacité de la chimioradiothérapie. Dans l’essai espagnol publié par Hitt et al., après TPF, 47 patients (30 %) n’ont pas rec¸u la chimioradiothérapie [12]. Pendant la chimioradiothérapie, les taux de neutropénie de grade 3–4 et de mucite de grade 3–4 étaient plus élevés après TPF que sans (30 % contre 18 %, et 49 % contre 33 %). Après TPF, 23 % des patients ont eu une interruption de radiothérapie de plus de cinq jours. Seuls 59 % des patients ont rec¸u les trois cycles planifiés de cisplatine en concomitance avec la radiothérapie après TPF, alors qu’ils étaient 80 % à les recevoir dans le bras chimioradiothérapie. Les décès liés au traitement étaient également plus nombreux dans le bras TPF–chimioradiothérapie par comparaison au bras chimioradiothérapie (13 contre deux). Dans l’essai PARADIGM, 10 % des patients des patients du bras TPF–chimioradiothérapie n’ont pas rec¸u la chimioradiothérapie [11]. Les taux de neutropénie fébrile et de mucite de grade 3–4 étaient significativement plus élevés dans le bras TPF–chimioradiothérapie que dans le bras chimioradiothérapie (neutropénie fébrile : 23 % contre 1 %, p < 0,0001 ; mucite : 47 % contre 16 %, p < 0,0001). Cependant, il ne faut pas oublier que dans cet essai, la nature de la chimiothérapie concomitante n’était pas la même dans tous les bras (cisplatine dans le bras contrôle, carboplatine ou docétaxel dans les bras expérimentaux). Dans l’essai DeCIDE, 10 % des patients des patients du bras TPF–chimioradiothérapie n’ont pas rec¸u la chimioradiothérapie [13]. Le taux d’effets indésirables sévères était significativement plus élevé dans le bras TPF–chimioradiothérapie que dans le bras chimioradiothérapie (47 % contre 28 %, p = 0,002), avec notamment plus de neutropénies. Les décès liés au traitement étaient également plus nombreux dans le bras TPF–chimioradiothérapie que dans le bras chimioradiothérapie (six contre trois). Dans l’étude italienne de Ghi et al., l’observance radiothérapie était la même avec ou sans chimiothérapie d’induction. De même, les taux de mucite et d’épidermite de grade 3 ou 4 étaient équivalents [14]. Dans l’essai du Gortec 2007-02, l’observance de la radiothérapie et du traitement concomitant étaient les mêmes avec ou sans chimiothérapie d’induction mais il ne faut pas oublier que ces traitements étaient différents avec du TPF et du carboplatine dans un bras et du cétuximab dans l’autre [15]. Douze décès iatrogéniques sont survenus pendant la phase d’induction.

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Entre 10 et 30 % des patients ayant rec¸u une chimiothérapie d’induction par TPF n’ont pas rec¸u de chimioradiothérapie ensuite, principalement en raison d’une mauvaise tolérance allant jusqu’au décès iatrogénique. Après trois cycles de TPF, la tolérance de la chimioradiothérapie avec platine était moins bonne alors que l’association de radiothérapie et de cétuximab semblait bien tolérée. 5. Et pour les tumeurs chez les patients infectés par l’HPV ? Le taux de cancers de l’oropharynx liés à une infection à Human papilloma virus (HPV) est en constante augmentation dans les pays développés. Ces tumeurs viro-induites ont un pronostic plus favorable, en grande partie dû à une meilleure radiosensibilité et chimiosensibilité. Une stratégie de désescalade thérapeutique est en cours d’étude avec de nombreux essais actifs. La majorité se base sur un traitement séquentiel associant chimiothérapie d’induction puis radiothérapie à dose réduite (essai de l’ Eastern Cooperative Oncology Group [ECOG] E1308, essai Quaterback). La sélection des patients pouvant potentiellement recevoir une dose réduite sans risque de perte de contrôle se fait sur la réponse à la chimiothérapie d’induction. En effet, un vieux dogme dit que la chimiosensibilité prédit la radiosensibilité, ce qui est remis en cause par certains. Dans l’essai DeCIDE, parmi les 285 patients inclus, 49 patients ont eu une recherche d’HPV. Les patients infectés par le virus avaient une meilleure probabilité de survie avec le TFP suivi de chimioradiothérapie qu’avec la chimioradiothérapie seule, sans que cela soit significatif étant donné le faible nombre de patients [13]. En revanche, dans l’essai du Gortec 2007-02, les patients atteints d’un cancer de l’oropharynx surexprimant p16, marqueur indirect de l’infection par l’HPV, avaient une durée de survie sans progression similaire, qu’ils aient été pris en charge par chimioradiothérapie ou par TPF et radiothérapie–cétuximab [17]. Nous ne disposons donc actuellement pas de suffisamment de données pour que le statut selon l’HPV influence la décision thérapeutique, y compris le choix d’une chimiothérapie d’induction. 6. Conclusion La chimiothérapie d’induction est à réserver aux patients ayant un envahissement ganglionnaire important car elle permet de diminuer le risque de survenue de métastases à distance. Si elle est utilisée, elle doit être préférentiellement suivie d’une association de radiothérapie et de cétuximab, car la chimioradiothérapie avec platine est mal tolérée après TPF. La chimioradiothérapie reste le traitement de référence des cancers ORL localement évolués. Déclaration de liens d’intérêts F.H. : Merck Serono, MSD, BMS. Les autres auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Anon. Projections de l’incidence et de la mortalité par cancer en France métropolitaine en 2015 - Tumeurs solides. Saint-Maurice: Institut de veille sanitaire; 2015 [Disponible en ligne à l’adresse : http://www.invs.sante.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-chroniques-ettraumatismes/Cancers/Surveillance-epidemiologique-des-cancers/ Estimations-de-l-incidence-de-la-mortalite-et-de-la-survie/Projections-de-lincidence-et-de-la-mortalite-par-cancer-en-France-metropolitaine-en-2015Tumeurs-solides. Accès le 10/06/2017]. [2] Pignon JP, Bourhis J, Domenge C, Designe L. Chemotherapy added to locoregional treatment for head and neck squamous-cell carcinoma: three meta-analyses of updated individual data. MACH-NC Collaborative Group. Meta-analysis of chemotherapy on head and neck cancer. Lancet 2000;355:949–55.

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